Raid Hand’Forts 2017, l’Aventure Humaine et Sportive.

Ma première participation au raid Handi’ Forts 2017

L’envie

Cela fait 2 ans qu’Hervé (Gugu) participe à cette aventure et 2 ans que je le rejoins sur quelques points du parcours pour l’encourager lui et son équipe.

2 ans qu’à la fin de chaque édition, je sens cette atmosphère spéciale qui me fait dire : « j’ai envie, moi aussi, de participer et de vivre cette aventure extraordinaire ! » et puis….. je doute, je ne veux pas être un poids supplémentaire pour l’équipe.

Ça à l’air déjà suffisamment ardu, je n’ai pas les capacités physiques. Alors, je laisse ma place et je mûris tout cela.

Et puis cette année l’Aqua Sport Comtois est à nouveau engagé dans le Raid et Gugu est sollicité. Il demande si d’autres membres du club veulent participer.

Il laisse volontiers sa place pour que d’autres profitent de l’expérience mais personne ne se manifeste. Tant pis pour eux.

Gugu ne renonce pas et s’inscrit et comme il faut une seconde personne pour représenter les sportifs et l’ASC je me lance avec l’appréhension de ne pas être à la hauteur. Mais comme l’envie est tellement plus forte, alors j’y vais et nous verrons bien !

L’équipe

Pour être complète, l’équipe est constituée de 2 membres d’une entreprise, 2 membres d’une association et de 2 personnes « handicapées ».

Avril 2017 : première réunion au Palais des Sports pour la présentation de l’édition aux participants et présentation des équipes.

Qui vont être nos co-équipiers ? Chacun se scrute, quelques-uns se connaissent déjà. A quelle sauce va-t-on être mangé ?

Nans arrive, puis Paul et ensuite Denis. Tous « valides ». Il manque Gwenaëlle. C’est surement elle la personne « handicapée », mais qui est la seconde ? On finit par se présenter les uns aux autres.

– Nans, CCAS de Besançon, 1ère participation, un peu « touche à tout au niveau sportif », nous informe que sa collègue, Gwen, ne pourra pas être présente, mais qu’elle a déjà participé au raid Handi- Forts. Hervé pense la connaître : elle est valide et … sportive.

– Denis nous est présenté rapidement par son éducateur. C‘est donc lui la seconde personne « handicapée »…. Quel est donc son problème ? Vraisemblablement une petite « déficience mentale », mais l’éduc ne s’étend pas sur le « problème » de Denis, ni sur son parcours.

Denis est un peu timide au début. On ne l’entend pas trop, mais au fur et à mesure du week-end, il est de plus en plus à l’aise.

Peut-être avons-nous réussi à le mettre en confiance ? Il pique des fous-rires, est toujours volontaire pour les activités proposées et avance à son rythme sans rechigner ni se défaire de sa bonne humeur et… de son sac à dos. Ah, son sac à dos … Il a dû mettre toute sa vie dans ce sac.

Il pèse une tonne, mais rien à faire, il ne veut pas s’en défaire.
Ça doit le rassurer.

On devra user de stratagèmes tout au long de ces 2 jours pour pouvoir le porter à sa place et le soulager un peu… Mais dès qu’il en a l’occasion, il nous le reprend et rigole !

– Et puis, il y a Paul, jeune homme d’une trentaine d’années, tout frêle, une allure de sportif, et un large sourire qui lui illumine le visage.

C’est lui qui nous questionne : « Vous faites partie de quelle association ? La plongée. Super, j’aimerais bien mais je ne sais pas trop bien nager et je m’essouffle vite, et puis l’eau de piscine c’est compliqué pour moi. Trop de bactéries.

Ça peut m’être fatal avec LA maladie ! ».
Maladie ? Quelle maladie ? De quoi il parle ? Il enchaine sans se défaire de son sourire. Ce sera la seule fois qu’il évoquera la maladie. « Vous pratiquez d’autres sports ? ».

Gugu lui explique qu’il a découvert le trail et qu’il commence à bien accrocher et à prendre du plaisir. Paul lui répond que lui aussi il court un peu et qu’il fait du vélo un peu. Renseignements pris, il s’avère qu’il a relié à vélo Besançon et la Pointe du Raz dans le Finistère, et qu’il a fait 2 fois déjà le Marathon de Paris en 4 heures… un exploit avec la maladie.

Il nous apprend que dernièrement il a gravit le Mont Blanc, mais qu’il a renoncé à quelques mètres du sommet (4500 m et le sommet est à 4809 mètres). Il ne nous dit pas que les conditions météo étaient mauvaises, juste qu’il a dû abandonner. Nous, supers admiratifs nous le félicitons de son exploit. Non, lui, il ne retient que l’échec et pas la performance. Il va recommencer l’an prochain, il s’entraine et cette fois, il ira au bout, au sommet…

Mais c’est qui cet EXTRATERRESTRE ?

Paul, atteint de la mucoviscidose depuis qu’il est bébé a une capacité pulmonaire réduite à 55 %. Et vlan ! Première grande claque ! Le mec, il a « qu’un poumon » et il court des marathons, gravit le Mont-Blanc…
Paul ne s’attarde pas sur son état de santé, ni sur ses performances…

La maladie, ce n’est pas la sienne, il vit avec, c’est tout. Il est comme tout le monde. Sauf, que ce grand bonhomme a un courage énorme. Il bouffe la vie et en apprécie chaque instant sans jamais se plaindre. Il avance dans la vie comme dans ses défis sportifs : un pas après l’autre, au mental d’acier et il reste humble, accessible, et à l’écoute des autres.

Quelle leçon de vie ! Il force, malgré lui, l’admiration. Paul est un GRAND petit homme !

Les présentations faites, je me dis qu’il va falloir se surpasser, tout donner, sans jamais flancher. Tous les 6 nous formerons une sacrée équipe de winners. Pas besoin de joëlette, de hand-bike, ni de tandem. Tous les membres sont autonomes. On regarde autour de nous et on pense avoir un grand avantage sur les autres équipes… moins valides…
On va tout déchirer.

Au final, on terminera 12ème sur 24 équipes engagées, et devant nous des équipes hautement plus « handicapées » (mal voyant, para- tétraplégique, trisomique)…

Comme quoi ! Il n’y a pas que le physique dans la vie !!! A chacun ses compétences et quand elles sont mises en commun, ça peut faire mal !

 

De gauche à droite : Nans, Denis, Gwenaëlle, Jacotte, Gugu, Paul

L’aventure sportive…

Tout au long du week-end, nous participons à des ateliers sportifs et culturels, qui nous permettent, à travers le dédale du Raid, de découvrir Besançon et ses trésors. Des quiz sur l’environnement, l’architecture, l’histoire, l’art, l’évolution de l’aménagement de la ville font aussi partie des épreuves.

 

Une concurrence taquine entre les différentes équipes est perceptible. On se donne de fausses informations, de fausses directions ; bref, on travaille la « concurrence » sur le mental. On développe gentiment des astuces, de la propagande pour faire douter « l’adversaire ». Cela reste bon enfant, on redevient de grands gamins… On chuchote, on regarde ailleurs, on se vante d’être invincible. On essaie de tricher, un peu, aussi. Mais surtout, et c’est l’essentiel, on s’amuse et on se marre !

Les différents ateliers sportifs (tyrolienne, escrime, tir à l’arc, dragon boat, basket fauteuil, ping-pong, football américain, tir à la carabine, base ball…) sont adaptés pour que TOUS les membres des équipes participent, valides comme handicapés.

Et pour « corser » certaines épreuves -ou plutôt nous faire apprécier les difficultés du handicap-, les valides sont mis en situation de handicap : basket fauteuil, tir à l’arc à l’aveugle…

Nous découvrons ainsi que la plupart des sports sont accessibles à tous, il suffit simplement de les adapter. Là encore, la concurrence est rude.

 

Pas d’enjeux réel dans cette « compétition » mais chacun veut en découdre avec les autres et avec lui-même. Ça «chambre » pas mal. Personne ne lâche rien, et personne ne se fait de cadeaux. On veut gagner, marquer le plus de points possibles, vaincre… mais toujours avec un bon état d’esprit, de camaraderie, de convivialité.

L’enjeu n’est pas la victoire, mais le dépassement de soi.

…et l’aventure humaine

Avant tout c’est cela le raid Handi-Forts, une aventure humaine chargée en émotions qui fait s’interroger sur ses états d’âme, sa perception de la vie et des autres, sur la notion de différence et en un mot, sur la tolérance.

Car oui, le parcours sportif est difficile, mais tout le monde s’entraide, pas seulement au sein de l’équipe mais de concert avec les autres équipes. En cas de difficulté technique, il n’y a plus de concurrent, mais des amis qu’il faut aider pour aller plus loin dans l’aventure, pour s’enrichir de cette hargne à vouloir mordre la vie à pleines dents. Oui, c’est dur mais personne ne se défait de son sourire, et on rit, on rit de partout.

L'aventue humaine

Tout au long du raid, nous sommes chouchoutés par les BENEVOLES, sans qui l’aventure ne pourrait pas exister. Ces bénévoles nous nourrissent, nous font traverser en sécurité, nous expliquent patiemment les épreuves et cela, toujours avec le sourire, un petit mot gentil, des encouragements, des interrogations sur notre niveau de fatigue, notre motivation. Ils se comportent en véritable « maman » toujours au petit soin.

Ils nous dorlotent, nous cajolent, font passer les autres avant eux, donnent de leur temps et de leur personne.
Dimanche en fin d’après-midi, on passe la ligne d’arrivée. L’émotion est forte. Je sens les larmes qui montent, la gorge qui se noue. La joie et la tristesse se mêlent.

Cette belle aventure est finie. Toute cette chaleur humaine, cette famille vont me manquer. Mais je me sens riche, vivante.
Toutes les équipes se regroupent pour le classement et la remise des « trophées ». Denis repartira avec… dans son sac à dos… la coupe tant méritée et convoitée.

Et la musique se lance, c’est l’heure de la Flash Mob. Valides, handicapés, bénévoles, spectateurs, tous dansent ensembles.

Pour conclure, le RAID HANDI-FORTS, c’est : la chaleur humaine, le partage, la tolérance, le dépassement de soi. Bref c’est formidable. Ça bouscule, ça chamboule, ça remet en question. Mais cette aventure vaut vraiment le coup d’être vécue. Alors vivement l’édition 2018, et cette fois je ne suis pas sûre de vouloir laisser ma place…

BOUFFER LA VIE à 200 % et ne pas juger les gens sur ce qu’ils paraissent être mais sur ce qu’ils sont !

 

Jacotte – équipière CCAS/ ASC 2017

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